Waste Land

Dans Waste Land, il n’est question que de descendance, de lien et d’héritage. Leo, joué par un Jérémie Renier tout en volume, en épaisseur, est un flic névrosé qui s’obstine à vouloir résoudre une série de crimes avant la naissance de son enfant. Le film est ainsi rythmé par le décompte des semaines de grossesse.
Dans un éclat de rire contenu, son équipier dit de lui qu’il serait le descendant du roi Léopold. Et il devient ainsi, sans le vouloir, au détour d’une plaisanterie, le garant de l’Histoire belge. Insidieusement, à l’image de ce père malade auquel il se soumet, le passé vient écraser le petit flic. Et il regarde devant lui et craint de ne pas être digne de l’enfant à naître. Il s’engage, dès lors, dans une vaine quête, à la poursuite d’un fantôme, d’un entrepreneur qu’il soupçonne de tuer des immigrés à l’issue de rites sorciers. Cet homme d’affaires, ogre invisible, c’est une forme de mauvaise conscience, c’est le poids colonial que porte sur ses épaules le prolo, le flicard belge condamné à partager la douleur des Congolais.
Waste Land est une oeuvre dense, riche et intense. Comme tous les grands flics de cinéma, le personnage de Jérémie Renier regarde au fond de l’abîme, conscient d’y trouver son reflet. Et Pieter Van Hees parvient admirablement à restituer une atmosphère poisseuse, à recréer une Belgique anxiogène. Il s’inscrit dans une veine néo-noire, dans un cinéma qui conjugue le malaise social et les archétypes du genre. Ainsi, il partage son combat avec d’autres grandes réussites récentes comme Bullhead et Alleluia.