Les Rois de la piste

Business clan

De mère en fils, et même petit-fils, l’arnaque cœur de Fanny Ardant, qui a la famille dans le sang. La comédie hold-up de Thierry Klifa sur des voyous à lier est irrésistible.

Franchement, on croirait une scène tirée d’une comédie ratée ! Quelle bande d’amateurs, les Zimmermann ! Coup foireux : ces monte-en-l’air sont des baltringues. Ils ont beau avoir du métier, voler comme ils respirent, sur plusieurs générations, ils tombent mal et ratent leur cambriolage comme des bleus. Tout ça à cause d’une toile de Tamara de LempickaLa Musicienne, qu’un des cambrioleurs esthètes admire pour son style distinctif associé au mouvement Art déco, caractérisé par des lignes géométriques, des formes élégantes et des couleurs vives.

Si le nom de Tamara de Lempicka ne vous dit rien, ni ce célèbre tableau, sachez qu’il figure dans le clip de la chanson de Madonna, Vogue, qui incorpore des références à l’âge d’or du cinéma hollywoodien, ainsi qu’à des icônes de la mode et de l’art.

Dans la vraie vie, La Musicienne a bel et bien pris la poudre d’escampette comme dans un mauvais film. Heureusement, les Sherlock Holmes de l’Agence Artiaz, des pros de la traque artistique, ont fini par remettre la main sur la toile après sept ans de cavale.

Les Rois de la piste de Thierry Klifa. Copyright Manuel Moutier - 2023 - NOLITA CINEMA

Le vol rocambolesque du tableau, motif du scénario de Les Rois de la piste, sert de prétexte à Thierry Klifa pour déclarer son amour à la famille. Et quelle famille ! En matriarche indomptée, rebelle, telle qu’en elle-même, libre : Fanny Ardant, l’actrice vibrante, qui met une énergie positive sur le plateau. Dans le rôle des fils, Mathieu Kassovitz et Nicolas Duvauchelle sont tout aussi barrés. Et le petit-fils joué par Ben Attal suit le mouvement, escroc en devenir et en héritage : le cinéma de Klifa braque l’esprit clanique.

Thierry Klifa, marchant sur les traces de Family Business (1989) de Sidney Lumet, mêle des éléments de comédie policière, de romantisme et de burlesque. Sur un fil, en équilibre instable, la légèreté comique et la gravité funambule se donnent le bras. Et peut-être qu’au fond, tout cela n’est que prétexte pour le cinéaste à une déclaration d’amour aux acteurs, en particulier à la petite bande formée pour cette fiction – une « famille de papier » fabriquée par les liens noués entre ses comédiens, sur et en dehors du plateau…

Ah, la famille…! Le grand sujet, avec ses amours compliquées, ses engueulades monumentales et ses réconciliations grandioses. Autour de la famille débordante du film, excessive, terriblement vivante, tourne un duo d’enquêteurs improbable, follement drôle : Laetitia Dosch et Michel Vuillermoz. Ils emportent tout.

Quel cirque que Les Rois de la piste ! À mourir de rire, mais aussi à s’attendrir et à s’attacher. Tellement loufoque que ça en devient aussi irrésistible qu’un tour de magie maladroit ! Comme si un kangourou bondissant avait eu l’idée de faire du trampoline sur un nuage de guimauve…