La isla mínima

Film de genre intense et léché

Carton plein des prix espagnols pour 2014, La isla mínima a glané dix Goya, dont meilleur film, réalisateur, scénario original, acteur (Javier Gutiérrez) et révélation féminine (Nerea Barros). Sans oublier les cinq principaux prix techniques (image, décor, costumes, musique, montage). Il faut dire que ce polar poisseux est ultra-soigné et maîtrisé dans sa forme. Ambiance bayou brûlant avec marais mystérieux, maisons isolées, disparitions de corps, scénario à énigmes, et ombres du passé franquiste pour cette chronique andalouse du début des années 1980. Un opus classieux pour l’auteur de la comédie sévillane Costard (2002) et du portrait âpre et populaire Les 7 Vierges (2005). Deux flics antagonistes font la paire pour coincer un tueur en série de donzelles. Tout transpire le doute et la suspicion. Rodriguez s’illustre en bon faiseur, doublé d’un maître de l’atmosphère, quelque part entre Memories of Murder de Bong Joon-ho et les récents marécages de Paperboy de Lee Daniels et de la série télé True Detective. On est happé par ce récit au cordeau, qui mène inéluctablement à un dénouement cathartique. Le travail des deux scénaristes enchâsse finement la fiction à la sale vérité historique de l’Espagne. Tout est calibré au millimètre, avec quelques invraisemblances narratives, comme cette scène de visite surprise et confrontation en voiture d’un jeune suspect, vite expédiée en queue de poisson. Mais ce divertissement sombre remplit sa mission d’honnête film de genre, intense et léché.