Cannes 2022, Le palmarès

Tel est prix

Et si certaines questions restaient résolument irrésolues ? C’était quoi, ça ? En anglais : What the fuck happened ? C’est donc un palmarès fourre-tout composé de dix films primés sur vingt et un présentés en compétition qui a scellé cette étrange édition 2022.

On ne saura jamais ce qui s’est passé au sein de ce jury du 75e Festival de Cannes. Asghar Farhadi, Rebecca Hall, Ladj Ly, Jeff Nichols, Deepika Padukone, Noomi Rapace, Joachim Trier, Jasmine Trinca et le président Vincent Lindon. Ce dernier a tenu à préciser dans son discours de clôture (nouvelle tradition ?) que sa voix n’avait pas été « plus prépondérante que celle des autres » et que la démocratie au sein du groupe s’était exprimée… avec ses inconvénients. Ce qui signifie aussi qu’il a fallu négocier âprement, se rallier à la majorité et contenter tout le monde et son père… Ça se voit.

Dix films primés sur vingt et un. C’est beaucoup. Le prix du 75e va aux frères Dardenne, sans doute pour éviter une troisième Palme d’or après Rosetta (1999) et L’Enfant (2005)) ou alors une Palme d’or ex æquo avec Triangle of Sadness / Sans filtre de Ruben Östlund. Le grand écart que ça aurait représenté est à l’image de ce qui a dû tirailler les jurés entre des formes de cinéma, disons, pour aller vite, « classiques » et plus « iconoclastes » (définitions à la serpe, certes. Pour plus de détails, lisez donc nos critiques et les chroniques précédentes). D’où le Prix du jury ex æquo à Les Huit Montagnes de Charlotte Vandermeersch et Félix Van Groningen et EO de Jerzy Skolimowski. Les premiers s’embrassant fougueusement, le second citant ses ânes par leurs noms (pour ne pas s’appesantir sur d’autres ânes ?). D’où le Grand Prix du jury ex æquo à Close de Lukas Dhont et Stars at Noon de Claire Denis.

On déplore donc une absence de choix clair, une distribution façon « École des fans », où tout le monde a gagné… Mais il est probable que si le jury avait récompensé seulement les films classiques ou seulement les radicaux, nous aurions aussi trouvé à redire. Reste qu’on s’explique très mal l’absence au palmarès de Leila’s Brothers de Saeed Roustayi (tout de même récipiendaire du Prix de la citoyenneté et du Prix FIPRESCI de la presse internationale) et celle de Armageddon Time de James Gray.

L’an dernier, la Palme d’or à Titane de Julia Ducourneau était un geste fort, courageux, original. Même si il y a une certaine bravoure à célébrer le très controversé (y compris à BàP) Ruben Östlund et le faire rejoindre le club très sélect des doubles palmés, il y a quelque chose d’inabouti dans ce palmarès (et aussi dans la sélection) qui laisse un sentiment plus que mitigé.

La Palmarès 2022

 

Palme d’or du court-métrage

The Water Murmurs de Jianying Chen

Mention spéciale 

Lori d’Abinash Bikram Shah

Caméra d’or

War Pony de Gina Gammell et Riley Keough 

Mention spéciale 

Plan 75 de Hayakawa Chie 

Prix du Jury

Ex aequo

Les Huit Montagnes de Charlotte Vandermeersch et Felix Van Groeningen

EO (Hi-Han) de Jerzy Skolimowski

Prix d’interprétation masculine

Song Kang-ho pour Broker (Les Bonnes Étoiles) de Hirokazu Kore-Eda 

Prix d’interprétation féminine

Zar Amir Ebrahimi dans Holy Spider / Les Nuits de Mashhad d’Ali Abbasi

Prix du scénario

Tarik Saleh pour Boy From Heaven

Prix de la mise en scène

Park Chan-wook pour Decision to Leave

Grand Prix du Jury

Ex aequo

Close de Lukas Dhont 

Stars at Noon de Claire Denis

Prix du 75e anniversaire

Tori et Lokita de Jean-Pierre et Luc Dardenne

Palme d’or

Sans filtre (Triangle of Sadness) de Ruben Östlund