La Générale

Séquences commentées par Valentine Varela

Dans le formidable La Générale (lire ici notre chant d’amour), Valentine Valera filme une classe de seconde d’un lycée parisien, où sont accueillis des élèves refusés dans d’autres établissements, avec une grâce et une sensibilité rares. Retour sur cinq séquences ou personnages marquants par la réalisatrice.

Les plans de la mer au début et aux deux tiers du film

 

« Je suis partie en week-end avec les profs, invitée à dormir dans la maison de famille de Maureen. Je suis partie seule sans mon cadreur, mais lorsque j’ai vu Maureen, Catherine et Emmanuel les pieds dans l’eau, je n’ai pas pu m’empêcher de sortir mon téléphone portable et de les filmer. Ce sont ces plans qui sont dans le film. Il y avait quelque chose de touchant, de fragile presque, après des mois d’enfermement dans le lycée, de voir ces profs respirer, sortir à la lumière du jour, libres, se reconnecter avec l’immensité de la nature, y reprendre des forces avant de replonger. »

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L’atelier « Baroque »

 

« L’arrivée du baroque dans la classe a été une vraie respiration. Un jour, Maureen, la prof de français, me dit : « Cet après-midi, il y a trois musiciens chanteurs qui interviennent dans la classe ». Nous avons filmé cet atelier et ce fut un moment magique. La musique est un langage universel, qui touche au cœur. On est plein d’a priori, on se dit : « Oh, ben non ! Ces gosses jamais ne vont s’intéresser à la musique du 17e siècle ! II faut leur faire entendre du rap ! » Le voyage dans le temps que propose cette musique a éloigné les élèves de leurs problèmes personnels. Et certainement aussi, l’impression d’être respectés les a transformés. C’est à partir de cet atelier « Baroque », lequel est intervenu vers le mois de décembre, que je j’ai cru au film. J’aimais le contraste et l’inattendu. À partir de ce moment, nous avons engagé un ingénieur du son, Renaud, qui a eu la bonne idée de cacher des micros dans les trousses des jeunes, avec leur consentement bien sûr, pour ne rien rater de leurs réflexions. Car nous ne pouvions pas équiper tous les jeunes et les profs d’un micro HF. C’était très ingénieux de penser à cette solution, et nous bougions les trousses selon les événements qui surgissaient dans la classe. C’est un procédé que nous avons conservé jusqu’au bout. »

 

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Les portables

 

« J’ai été très frappée par la présence du portable dans les classes, je croyais que c’était interdit, mais non ! Ça l’est au collège, mais pas au lycée. Mais quelle pollution ! Pauvres profs, qui doivent lutter contre cette présence permanente ! J’ai passé beaucoup de cours à filmer les élèves sur leurs portables, à jouer, tricher, parler avec des copains en plein cours. »

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Imane

 

« Au début du film, lorsqu’on découvre Imane pour la première fois, pour nous aussi ce fut notre premier jour de tournage avec elle. Nous sommes fin septembre. Jusque-là, nous tournions dans les classes de première ou de terminale du lycée, mais les jeunes étaient très conscients de la caméra, c’était très difficile de se faire oublier. Après quelques semaines de tournage à tâtonner,  j’ai dit à mon cadreur : « Essayons une classe de seconde avec Christine ». Nous n’étions que tous les deux à ce moment-là, pas d’ingénieur du son, juste un micro-perche que je tenais à la main. Le cours débute et là, nous découvrons le phénomène Imane, qui capte l’attention de tout le cours, qui oublie totalement la présence de la caméra au bout de trois minutes. Nous étions fascinés par cette jeune fille : j’avais trouvé un de mes personnages, c’était certain. »

 

 

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Christine

 

« L’engagement de Christine est immense, et je n’ai montré que la partie émergée de l’iceberg. J’ai assisté à son engagement tant au point de vue juridique pour des élèves partis en garde à vue, qu’auprès de jeunes filles enceintes, totalement démunies face à une grossesse non désirée. Elle a passé son année et sa carrière à écouter ces jeunes et à les aider. »

 

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