Qu’est-ce qu’ils ont tous avec David Bowie ?

Top 5 des chansons de Bowie au cinéma

Cette année, on a entendu des standards de David Bowie dans plusieurs bandes originales de films : depuis La Vie rêvée de Walter Mitty de Ben Stiller et Du sang et des larmes de Peter Berg, jusqu’à Horns de Alexandre Aja (sortie le 1er octobre) et 71 de Yann Demange (sortie le 5 novembre), en passant par American Bluff de David O. Russell ou Les Gardiens de la Galaxie de James Gunn. Plus que les Rolling Stones ou les Beatles, la star british et protéiforme de la pop music envahit les bandes-son. C’est sans doute dû au revival indéniable des années 1970 et 80 dans les fictions. Mais pas seulement. Transgénérationnel et original, outrancier ou populaire, il trouve sa place aussi bien dans les films d’auteur que dans les blockbusters. Ce qu’on aime le plus ? Quand la chanson de Bowie utilisée à l’écran n’est pas qu’un simple ornement, mais contamine le récit et devient partie intrinsèque de la mise en scène. La manie Bowie au cinéma ne date pas d’hier. Top 5 de nos préférés : pour chacun de ces films, le titre de la chanson pourrait en être le sous-titre…

 


1. Mauvais sang (Leos Carax – 1986)
Modern Love – 1983


 

La comète de Halley écrase la ville de sa chaleur, un virus frappe tous ceux qui font l’amour sans amour… Alex (Denis Lavant), acrobate et ventriloque, fuit le bonheur avant qu’il ne se sauve en une course effrénée sur fond de palissades et de David Bowie : Modern Love, l’amour moderne, chanson dédiée. C’est beau et triste, furieux, envoûtant. Comme la question posée à Anna : « Est-ce que tu crois qu’il existe, l’amour qui va vite et qui dure toujours ? ». En 2013, dans Frances Ha, la comédie américaine indé à la mode de Noah Baumbach, Greta Gerwig filmée en travelling à son tour court, danse et virevolte dans les rues de New York sur Modern Love. Dès son premier film, Boy Meets Girl, Carax suit Alex / Lavant qui écoute When I Live My Dream, et dans le troisième, Les Amants du Pont-Neuf, c’est Time Will Crawl dansé par des pieds inconnus que regarde Michèle (Juliette Binoche) au cours d’une balade nocturne…


 2. La Vie aquatique (Wes Anderson – 2004)
Life on Mars – 1971


 

Champion toutes catégories du nombre de chansons de Bowie, le film fou de Wes Anderson offre une dizaine de reprises en portugais et à la guitare sèche par le chanteur brésilien Seu Jorge : Life on Mars, Ziggy Stardust, Changes, Rebel Rebel, etc. Celles-ci, jouées par ce membre de l’équipage, accompagnent les pérégrinations de l’océanographe à bonnet rouge Steve Zissou et de sa bande. Mais lorsque Zissou (Bill Murray) reçoit, lors d’une réception à bord d’un paquebot, la visite d’un grand dadais blond (Owen Wilson) lui annonçant qu’il est son fils, la musique en fond sonore devient plus forte et la voix de Bowie envahit l’espace, tandis que, voulant masquer son émotion, le nouveau père avance seul jusqu’à la proue du bateau et s’allume un cigarillo. Envisager la vie sur Mars, quand on la passe au fond de l’eau à chasser le requin-jaguar, c’est plus qu’une chanson décalée, c’est une profession de foi !


 3. Control (Anton Corbijn – 2007)
The Jean Genie – 1973


 

Le film s’ouvre en 1973 sur le jeune Ian Curtis (Sam Riley) rentrant dans sa banlieue de Macclesfield, un paquet carré sous le bras. Rompant le silence, la chanson Drive-in-Saturday l’accompagne, il attrape au vol sur une chaise le blouson de fausse fourrure de sa petite sœur, et s’installe dans sa chambre où le son provenant d’un petit ampli continue, tandis qu’on voit la pochette du disque de Bowie, Aladdin Sane, qu’il vient juste d’acquérir. Il se maquille, se vêt du blouson et fume pensivement. Plus tard, il danse sur The Jean Genie en se regardant dans le miroir où il a écrit les initiales JG, puis dans le prolongement de la musique, emmène sa petite amie Debbie (Samantha Morton), piquée à son meilleur copain, au concert de David Bowie. Influence avérée du futur leader de Joy Division dont Control raconte l’histoire, Bowie en pleine mutation glam rock fait ici partie intégrante du récit, comme une référence historique. Ça vous pose un homme.


4. La vie rêvée de Walter Mitty (BEN STILLER – 2014)
Space Oddity – 1969


La chanson de David Bowie est d’abord utilisée dans les dialogues : Ted (Adam Scott), l’un des petits chefs de Walter Mitty (Ben Stiller) à Life Magazine, passe son temps à se moquer de lui, car il est toujours dans la lune, en l’interpellant par les premiers mots de la chanson : « Ground Control to Major Tom / Contrôle Terrestre à Major Tom ». Plus tard, Cheryl (Kristen Wiig), la femme dont Walter rêve et qui est une de ses collègues, lui dit que Ted a tort dans sa lecture de Space Oddity : pour elle, cette chanson parle « du courage, du fait de plonger dans l’inconnu». Lorsqu’il doit quitter son petit bureau pour mettre la main sur une photo perdue, il se retrouve au Groenland dans un bar où il « voit » Cheryl jouer à la guitare Space Oddity, la voix de la jeune femme, bientôt rejointe par celle de Bowie soi-même, lui donne l’énergie de sauter dans l’hélicoptère qui l’attend au dehors. Une des plus belles scènes du film : émotion garantie.


5. Lost Highway (David Lynch – 1997)
I’m Deranged – 1995


 

Accompagnant le générique de début et de fin sur une route qui défile à toute allure, seulement éclairée par les phares d’une voiture et les traits jaunes de la ligne discontinue, la chanson de Bowie (écrite avec Brian Eno) est une entrée en matière extraordinaire. Un appel à la folie, à la perte de contrôle, à la paranoïa… Dérangé ? Là encore, les paroles font l’effet d’une profession de foi du personnage incarné par Bill Pullman, saxophoniste et meurtrier de son épouse qu’il croit infidèle, et dont les multiples personnalités envahissent peu à peu la narration.