LUFF 2019 : on y va !

Ça se fête. Le LUFF atteint l’âge légal pour assister à l’ensemble des films qu’il programme : rendez-vous en Suisse, du 16 au 20 octobre, pour la 18e édition du Lausanne Underground Film [and Music] Festival. Un événement ô combien majeur.

J’ai un peu honte, parce que l’an dernier je me suis précipitée au LUFF, comme j’en ai l’habitude depuis maintenant quelques années, sauf que cette fois j’en suis revenue les mains vides. Un compte rendu de festival ? Euh… Oui, mais, euh…

Il s’est passé que j’ai foncé bille en tête, obnubilée par la présence de Khavn de la Cruz, cinéaste philippin pour l’œuvre duquel j’ai eu un gros coup de cœur, deux années de suite, à L’Étrange Festival. La promesse d’élargir ma connaissance de ses Manila Guerilla Films m’excitait terriblement. Mais en découvrant les films qui étaient programmés, le champ des possibles s’est massivement étoffé : Khavn ne se cantonne pas à un style défini, il expérimente tous azimuts. Faute de temps pour approfondir cette nouvelle donne, plutôt réjouissante, j’ai buggé. Pourtant, j’ai eu l’occasion de bavarder avec le flamboyant cinéaste en cheminant entre deux salles – c’est l’un des plaisirs du LUFF, cette proximité avec les invités – il y aurait donc eu matière à bricoler quelque chose… Et puis non. Bref. Le passé est passé, parlons plutôt de ce qui vient.

Khavn de la Cruz, sur scène, en compagnie de Julien Bodivit, directeur artistique du LUFF. Photo J.U.

Pour ne pas risquer de réitérer mon fâcheux silence, je prends cette année le parti de faire une annonce de festival plutôt qu’un compte rendu. La prévention, c’est important. 

Voilà qui m’amène tout naturellement à mon point de mire principal de cette nouvelle édition : la programmation intitulée « La LUFF éducation, ou quand le cinéma éducatif devient subversif ». Soit quatre séances regroupant des films plus ou moins courts, plus ou moins sérieux. Et a priori, plutôt +plus+ que moins choquants. Vilaine moi, j’en ai les yeux qui brillent. Déjà, seule devant mon ordinateur, j’ai enchaîné les fous rires et les cris scandalisés devant les déviants Apaches (quand on est enfant, mieux vaut éviter de jouer dans une ferme) ou The Finishing Line (quand on est enfant, mieux vaut se méfier des trains), alors qu’est-ce que ce sera en salle avec d’autres spectateurs ?! Je me réjouis en particulier du programme Hell’s Highway: The True Story of Highway Safety Films – va y avoir des collisions automobiles en pagaille, je le sens bien. Et puis, côté classiques retoqués par des commanditaires qui n’en demandaient pas tant, La Bombe de Peter Watkins n’a rien perdu de son implacable mise en garde contre l’armement nucléaire et ses conséquences concrètes. Quant à L’Île aux fleurs de Jorge Furtado, qui enchaîne à une vitesse folle des explications on ne peut plus factuelles sur un ton de prime abord loufoque, notamment basé sur la répétition (« les humains se distinguent des autres mammifères par un télencéphale hautement développé et des pouces préhenseurs »), il aboutit à une condamnation cinglante du capitalisme. À revoir encore et encore.

En sus de ce focus, je compte me concentrer sur trois autres points forts : celui consacré à Derek Jarman, « Poète punk » dont je méconnais la carrière, n’ayant vu qu’un seul de ses films. Et aussi, celui consacré à Barbara Hammer, « Queen of Queer Cinema », dont j’ignorais jusqu’alors l’existence, mais qui, présentée comme une pionnière du cinéma d’avant-garde des seventies, féministe et chantre d’une sexualité entre femmes hors carcans, semble des plus réjouissantes et stimulantes ! Enfin, en sa présence, je ne ferai certes pas l’impasse sur l’hommage que le LUFF rend à Gérard Kikoïne, « Entre sperme et sang ». J’ai en effet un certain appétit pour la si inventive vague pornographique des années soixante-dix.  

Avant de m’encanailler devant Bourgeoise et… pute ! (interdit aux moins de 18 ans, le LUFF y est donc désormais admis), j’irai évidemment faire un tour à l’incontournable librairie HumuS, histoire d’acclimater mes rétines devant quelques ouvrages polissons. Et en sortant de la tardive projection X, je ne manquerai pas de soumettre mes oreilles aux déluges de décibels dont les concerts du LUFF sont coutumiers. Chic, cette belle fête des sens commence ce soir !

Le film d’ouverture 2019 est Greener Grass de  Jocelyn DeBoer et Dawn Luebbe. Enjoy.