Cannes 2016 : Jour7

17 mai 2016

Riche journée du mardi 17. Trois films en compétition ! Deux connaissent les honneurs d’une exposition en première ligne, car Julieta et Personal Shopper sont signés de cinéastes reconnus et habitués de la Croisette. Pedro Almodóvar ne surprend pas avec le premier, mélo féminin centré sur le lien mère-fille, avec drame, séparation et secret, même si la maîtrise formelle et narrative est là. On a une forte impression de déjà-vu. Olivier Assayas tente, de nouveau, de flirter avec le genre, ici le film de fantômes, via les pouvoirs de médium d’une jeune femme meurtrie par la mort de son frère jumeau. La tension, l’audace, fonctionnent davantage que chez son collègue transpyrénéen. Il ose l’étrangeté, sur les pas de Kristen Stewart, corps offert à la caméra de celui qui la filma déjà dans Sils Maria.

La surprise envoûtante vient du nouveau sur la Croisette et cinéaste prodige du Brésil, Kleber Mendonça Filho. Aquarius est le portrait fluide, enveloppant et bouleversant d’une femme, sur vingt-cinq ans. Un travail subtil sur le corps, la maladie, la contamination, qu’elle soit corporelle, maladive ou dans les murs, et sur le lien à la musique tout au long d’un destin. Cette œuvre permet aussi à la star Sonia Braga de faire un retour fracassant sur la scène internationale, dans la peau de Clara, magnifique étendard de la féminité, du Brésil, de l’humanité.

Les deuxièmes opus des Françaises sœurs Coulin et de l’Américain Matt Ross manquent de poigne, de matière, de dépassement à Un Certain Regard. Ni Voir du pays, ni Captain Fantastic, n’emballent. De la peinture de jeunes soldats et soldates français de retour d’Afghanistan, en sas de décompression à Chypre, à la chronique d’une famille isolée dans la nature, loin des diktats sociétaux et matériels. Et les vedettes n’y changent rien, que ce soit Ariane Labed, Soko ou Viggo Mortensen.

C’est un film plus discret qui séduit. Tramontane, premier long-métrage libanais signé Vatche Boulghourjian, en compétition à la Semaine de la Critique. La quête des origines tout en finesse, détermination, émotion contenue, d’un jeune chanteur aveugle, qui découvre au moment de se faire un passeport, que sa naissance est autre que celle qu’il a toujours crue. C’est la voix qui s’élève, du chant initial au final, de l’incrédulité à l’acceptation. Bouleversant.

Les projections s’enchaînent, les files d’attente en plein cagnard, les heures avec le corps luttant contre les souffles glacés de clim’ agressive, les rumeurs de voisins et badauds sur les films et pronostics. La tête tournée vers le ciel pour recharger les batteries diurnes entre deux séances, entre les palmiers bling bling et les façades peuplées et chargées. Tenir le cap dans ce marathon passionnant. Avec l’envie, toujours, greffée au corps.

Palmier ciel bleu à Cannes pendant le festival croisette salle du soixantième

Palmier ciel bleu à Cannes pendant le festival croisette
Photographies : Olivier Pélisson.