Shéhérazade

Que jeunesse se passe

Premier long métrage de Jean-Bernard Marlin sur une idylle entre jeunes paumés à Marseille. Avec des acteurs débutants, pleins de charme et de gouaille. Âpre, sauvage et beau.

Zachary, 17 ans, sort de prison. Sa mère a refait sa vie, elle ne veut pas de lui. Il retrouve ses potes, étouffe sa rage et crâne un peu. Il croise Shéhérazade, jeune prostituée qui l’emboucane avant de s’enticher et l’accueillir dans la chambre qu’elle partage avec une copine trans… Zach va jouer les macs, et la spirale de mauvais choix ne va pas cesser de les engloutir…

Ce n’est pas l’histoire, battue, rebattue, vue cent et mille fois au cinéma. Ce n’est pas la découverte, si prodigieuse soit-elle, de «natures» de cinéma, Dylan Robert, alias Zachary et Kenza Fortas en Shéhérazade. Ce n’est pas Marseille, mélange de beau et de laid, captée comme volée, et jamais étalée à l’écran. C’est tout cela réuni, avec la verve et la gouaille, le tragique aussi. Et que ça tienne ensemble, violence et romantisme, imperfections, clichés et trouvailles mêlés, relève du petit miracle.

Présenté en Séance Spéciale à la Semaine de la Critique en mai dernier, Prix Jean Vigo en juin et trois fois primés au Festival d’Angoulême fin août, Shéhérazade saisit sans juger, sans démontrer, avec des accents pasoliniens, une jeunesse abandonnée. Des enfants qui singent des comportements trop grands, trop dommageables et trop dangereux, et revivent sans les revisiter les habitudes anciennes où les garçons sont petits chefs et les filles objets (de désir et d’échange). Le prix à payer -que l’on ne dévoilera pas ici- est un choc qui dit la difficulté des prises de conscience dans ce monde où tout semble virtuel. Cette résolution clôt en apothéose ce film rapide et, dans tous les sens du terme, étourdissant.