Une star du stand-up d’origine maghrébine essaie de se débarrasser de son encombrant frangin. Sur les préjugés et le regard des autres, passionnant.
Brahim et son frère Mourad sont en voiture, arrêtés à un feu rouge. Un passant filme le premier avec un téléphone portable, lui demande de lui faire un sketch et s’énerve devant son refus. Le second sort avec un démonte-pneu et menace le fâcheux… Ainsi s’ouvre Le Prix du succès : Brahim est une star du stand-up, tout lui réussit, et son frangin est toujours à ses côtés, manager, chauffeur, nounou, mère parfois… Mais Mourad est envahissant, et pète les plombs facilement. Et Brahim a une femme dans sa vie, Linda, qui est sa muse et son amour, et il voudrait bien changer de vie, engager un agent, prendre un peu de champ avec sa famille qu’il aime, respecte et aide financièrement…
La première qualité de ce deuxième long-métrage de Teddy Lussi-Modeste, après Jimmy Rivière (2011), est son scénario. Coécrit, comme le premier, avec Rebecca Zlotowski, il déroule avec intelligence une idée toute simple : quel effet le succès d’un jeune homme issu d’un milieu défavorisé a-t-il sur lui et son entourage ? Cette étude sensible et juste est constamment étonnante, sur le fil, travaillant les clichés pour mieux les éviter. On pense aux success-stories à la Jamel Debbouze ou à la Zinedine Zidane. Aux rapports ambigus de fascination et de jalousie que le badaud développe face à la vedette qui a « tout », alors qu’il n’a « rien ». Mené à toute vitesse, le film avance sans se départir d’une fluidité de bon aloi, efficace et clair, montrant aussi les doutes et la solitude du comique de fond jouant sur les mots, les triturant et les ressassant jusqu’au meilleur effet pour son spectacle. Les acteurs sont tous exceptionnels (Grégoire Colin en agent, Meriem Serbah en grande sœur…), et Maïwenn en amoureuse sensée illumine le film de sa radieuse présence. Le duo Tahar Rahim et Roschdy Zem, l’un solaire et naïf, l’autre ombrageux et blessé, est tout simplement remarquable. Une belle réussite.