Luna

Ce nouveau féminin

Luna, premier film d’Elsa Diringer, fait le portait d’une fille d’aujourd’hui qui s’accroche aux cimaises de la galerie générationnelle d’un nouveau cinéma de femmes.

Un jour, peut-être, on arrêtera le temps sur ce moment particulier où le jeune cinéma français a démultiplié l’image du féminin. Une nouvelle vague de réalisatrices débutantes place au centre de premiers films vigoureux de jeunes héroïnes en liberté : c’est Ava de Léa Mysius ; Jeune Femme de Léonor Serraille ; Grave de Julia Ducournau ; La fête est finie de Marie Garel-Weis.

Ce cinéma féminin n’est pas de revendication, de lutte, de contestation : il ne se produit pas avec un discours d’opposition, contre un masculin dominant, un sexisme discriminant, un ordre inégalitaire. Son moteur n’est pas militant, haro sur la misogynie. Il dit comment vivent les filles d’aujourd’hui, leurs peurs, leurs désirs, leurs rêves. Ce ne sont pas des poupées qui disent non, ces filles modernes sont des combattantes, elles sont vaillantes, elles sont vivantes, elles sont fières.

Luna de Elsa Diringer. Copyright Pyramide Distribution.

Luna d’Elsa Diringer, ajoute à cette série de portraits, composés au prisme du récit d’apprentissage. Rebelle et déboussolée, Luna quitte l’adolescence par la violence (vol, viol en réunion dont elle n’est pas la victime mais complice, avortement) et entre dans le monde adulte par l’espérance (un travail, un amour naissant). C’est l’été, le sud, le soleil est au zénith, il jette sa lumière crue sur la chronique brûlante des jours funambules de la jeune fille en quête d’indépendance. Elle vit seule avec sa mère, de pas grand-chose, elle marche sur un fil, au bord du vide et des déséquilibres, entre solitude et révolte.

Le récit tient sur peu d’intrigue, peu de profondeur, la réalisation d’Elsa Diringer a peu d’idées fortes, mais la caméra ne lâche pas son héroïne et dans sa proximité, possède l’énergie brute de Laëtitia Clément. Castée à la sauvage, cette nouvelle actrice impose son beau tempérament à l’errance sentimentale et existentielle de son personnage. Il y a en elle le dur, le doux, les contrastes changeants d’un naturel déconcertant. À son côté, il y a Rod Paradot, revenu la tête haute, moins indompté, moins cabré, mais toujours un peu farouche : il est amoureux et vibrant, il est troublant et superbe.