Gemini Man

Double jeu

Voilà un bon gros film d’action efficace, avec Will Smith à deux « âges » différents, et quelques bonnes surprises, dont un personnage féminin digne de ce nom.

Ancien Marine devenu tireur d’élite pour la CIA, Henry Brogan prend sa retraite, après un dernier contrat, audacieux. Lorsqu’il apprend qu’il n’a peut-être pas dégommé le méchant terroriste que ses dossiers lui décrivaient, il devient soudain la cible de tueurs déchaînés envoyés par le gouvernement. Il lui faudra se méfier de tous, voire de lui-même… Car un jeune homme qui lui ressemble beaucoup est à ses trousses. Son fils ? Son frère ? La science et les apprentis sorciers étant passés par là, la réponse est bien plus extravagante que cela…

Après Hulk (2003), qui traitait aussi du double, le réalisateur de Garçon d’honneur et Brokeback Mountain revient au blockbuster pour ce Gemini Man écrit par Darren Lemke, Billy Ray, et David Benioff (l’un des auteurs de Game of Thrones). Il y distille une réflexion de bon aloi sur la guerre, la science et tous les abus collatéraux ; dessine un méchant détestable (que Clive Owen endosse avec pas mal de cabotinage) ; n’oublie pas de semer çà et là quelques répliques amusantes, dont Will Smith et son acolyte, Benedict Wong, se régalent ; et fait la part belle à un personnage féminin pas potiche pour un sou, interprété par l’excellente Mary Elizabeth Winstead. Bref, il remplit sans peine un cahier des charges classique, bien que légèrement amélioré en termes de représentation de la société.

Mais surtout, filmant en 4K et en 3D (quoique, sur ce dernier point, on puisse avoir des doutes, car les décors y gagnent en relief ce qu’ils perdent en crédibilité), il livre un bon gros film d’action efficace et sans cesse haletant. Il y ménage quelques moments d’anthologie, dont une poursuite à moto qui renvoie toutes les réussites précédentes, issues des James Bond et autres Mission : Impossible, au rang de banals tours d’autos-tamponneuses pour enfants de six ans. Et y utilise des effets spéciaux spectaculaires redonnant à Will Smith sa frimousse du Prince de Bel-Air (comme récemment Samuel L. Jackson gagnait trente ans dans Captain Marvel). Ceci permettant à l’acteur, paré de ce rien de maturité dû à la cinquantaine et toujours aussi bon en dépit de quelques choix malheureux ces derniers temps, de se confronter à lui-même. Avec tout ce que cela peut générer de situations perturbantes et de réflexions sur la vie, l’âge et les secondes chances. Ce qui fait de ce film allant à cent à l’heure un bolide rutilant qui ne brasse pas que du vent… Il semble que tout soit mis en place au final (et en cas de succès), pour une hypothétique suite. Pourquoi pas ?