Ava

Le noir et l’espoir

Ava, le premier film de Léa Mysius, offre un concentré d’univers différents. Avec en prime, un sens esthétique en alerte. Une vraie découverte.

Ava est en vacances au bord de l’océan avec sa mère. À la suite d’analyses, elle est avertie qu’elle perdra progressivement la vue du fait d’une maladie de la rétine. Son quotidien prend dès lors une tournure inattendue, où la couleur noire acquiert une importance symbolique, diffuse et dangereuse. Premier long-métrage de Léa Mysius (prix SACD à la Semaine de la Critique 2017), Ava fut l’un des films les plus originaux de cette cession cannoise. La réalisatrice a pris le parti de suivre son héroïne à l’image d’un éloge à la vie et à la liberté, avec une mise en scène réciproquement débridée.

Celle-ci change constamment de registre, passant du naturalisme au rêve, jusqu’à étirer le récit vers le film de genre et le conte. La première partie se concentre avant tout sur le couple drôle et spontané formé par Ava – Noée Abita, d’une fraîcheur parfaite – et de sa mère célibataire – Laure Calamy, dont le génie comique n’est plus à démontrer – dans l’univers prosaïque des vacanciers, tout juste parasité par les cauchemars de la jeune fille. Puis le film glisse doucement dans un road trip plus inquiétant lorsque Ava s’agrippe à la beauté ténébreuse de Juan, un jeune gitan déclassé. Si le film souffre par endroits de quelques baisses de tension, le spectateur reste toujours captif de la beauté du cadre et de la lumière, signe d’une grande exigence de Léa Mysius et de son directeur de la photographie, Paul Guilhaume, à exalter le grain de la pellicule 35mm qui sied à leur sens esthétique. C’est ainsi qu’Ava, en sus de ses péripéties, délivre au spectateur une série d’images qui resteront tatouées dans son esprit : un chien noir, des corps sensuels sur la plage, un œil dans la bouche, la course des héros transformés un temps en guerriers chamanes.