Hippocrate
Hippocrate, deuxième long-métrage de Thomas Lilti, fait partie de ces films assez rares, à mi-chemin entre le divertissement et le réalisme social, porteur d’un humour intelligent et fédérateur. Des thèmes aussi forts que le poids de la responsabilité du médecin, l’erreur médicale et ses conséquences, l’impunité dans le secteur, les constats d’un système délabré, voire déliquescent, sont abordés en tout état de cause, puisque Thomas Lilti, outre son métier de réalisateur, est lui-même médecin. Avec une attention particulière portée à son sujet, qui révèle autant la volonté opiniâtre de restituer la vérité que de faire œuvre de confession autobiographique, le réalisateur compose un trio d’acteurs épatant, plongé dans une histoire captivante : à la suite d’un faux pas, l’interne-stagiaire Benjamin (Vincent Lacoste) est couvert par son père (Jacques Gamblin) qui dirige le service de l’hôpital. Abdel (Reda Ketab), médecin étranger et coéquipier de Benjamin, a néanmoins des doutes sur la responsabilité de ce dernier…
La découverte de cet univers médical peu filmé, soutenu par la précision des gestes médicaux, l’évocation d’un travail collectif quotidien et la dérision nécessaire à la décompression des équipes, permettent l’exposition de thèmes plus graves, notamment le malaise social sous-jacent et la précarité des métiers de la santé ou encore le sort de médecins étrangers relégués aux rôles secondaires. Cette densité de propos est articulée de manière étonnamment agile, tour de force d’une mise en scène très fluide : ou comment Hippocrate réussit, avec esprit, à faire passer la pilule.