Maestro

Peu avant sa disparition en 2009, le comédien Jocelyn Quivrin voulait réaliser et interpréter un film inspiré de son expérience avec Éric Rohmer sur le plateau des Amours d’Astrée et de Céladon. Il avait commencé à écrire avec Léa Fazer, cinéaste, scénariste et amie qui l’avait dirigé dans Notre univers impitoyable et Ensemble, c’est trop. Soit la rencontre d’Henri, jeune chien fou nourri au cinéma américain et de Cédric Rovère, vieux cinéaste amoureux du beau langage et de la jeunesse. Léa Fazer a repris et développé l’idée de départ avec un certain brio. Au delà de la reconstitution amusante et amusée du tournage champêtre de ce poème pastoral du XVIIe siècle écrit par Honoré d’Urfé, et des intrigues romantiques secondaires, qui en font une comédie charmante, Maestro est aussi une réflexion sur l’art et le temps, la beauté et la fragilité des choses, l’amour du cinéma et l’amour tout court. La transmission qui s’opère entre le vieux maître et son « élève » dépasse l’hommage pesant au réalisateur des Comédies et proverbes, grâce à l’interprétation gourmande de Michael Lonsdale, qui imprime sa silhouette et son phrasé inimitable pour donner sa version unique et décalée d’un homme à part. L’ensemble de la distribution – Dominique Raymond en productrice inquiète et Marie-Armelle Deguy en costumière dépassée par le manque de budget – est épatant. Pio Marmaï, Deborah François, Alice Belaïdi et Nicolas Bridet forment un quatuor de comédiens remarquable, leur sens du rythme et leur connivence sont un atout indéniable.