Berberian Sound Studio

Qui eût cru, il y a encore quelques années, que le giallo reviendrait au goût du jour ? Il est peut-être exagéré de dire que le thriller gothique à l’italienne (dont le nom est issu des fameuses couvertures jaunes des polars transalpins) est sous les feux de la rampe, mais on voit qu’il irrigue plus ou moins secrètement certaines œuvres contemporaines passionnantes, comme La Solitude des nombres premiers de Saverio Costanzo, Amer d’Hélène Cattet et Bruno Forzani ou Berberian Sound Studio. Mais là où Amer en proposait une relecture presque strictement sensuelle, Peter Strickland va beaucoup plus loin. Prenant prétexte d’une intrigue très référentielle, au cours de laquelle un preneur de son anglais (formidable Toby Jones) travaille sur la post-production d’un film d’horreur en Italie, le cinéaste tisse avec subtilité un récit complexe, où la réalité se fond imperceptiblement dans la fiction. C’est ainsi que le réalisateur britannique utilise, puis détourne les codes d’un genre pour le transformer en un espace mental, et interroge avec beaucoup d’intelligence la place du spectateur.