Haut les filles

Être rock

Retracer soixante ans de rock français féminin, c’est le pari du journaliste François Armanet dans le documentaire Haut les filles, coécrit avec un spécialiste de la musique, Bayon. Portraits sans anicroche d’artistes futées et talentueuses.

Le titre l’annonce : il est davantage question de condition féminine que de partition.

Avant 1968, les chéquiers étaient réservés aux hommes et l’avortement était interdit. Apparues en pleine société patriarcale, Françoise Hardy et Brigitte Fontaine ont pris la lumière de la scène. Musique mélancolique pour l’une et excentrique pour l’autre, look androgyne, leurs différences et ressemblances dessinaient un nouveau paysage dans l’industrie musicale : un horizon où les femmes revendiqueront désormais publiquement une certaine liberté.  

Depuis ces combats féministes et Simone de Beauvoir, qu’est-il advenu au genre féminin ? Dix chanteuses tentent de percer le mystère, dix femmes, que cinquante ans parfois séparent, se confient sur leur vision de la féminité et leur place au sein d’un espace artistique aux codes majoritairement masculins.

D’observations en confessions, une envie les rapproche toutes : celle d’être regardées sur scène pour ce qu’elles sont : uniques. À cet endroit, il faut saluer l’approche respectueuse du montage, qui ne coupe pas leurs paroles par des morceaux musicaux.

Ode à la femme assumée et intéressante, Haut les filles est toutefois quelque peu avare en émotions. Enchaînant interviews, concerts et images d’archives, le format du documentaire crée en effet une distance entre son sujet et le spectateur. Si certains passages font écho aux difficultés actuelles des femmes (l’endométriose, par exemple), la plupart des séquences laisse l’impression d’une discussion agréable sans argument saillant ni leçon à apprendre.

Même si chaque artiste se révèle bien être un modèle d’émancipation et d’indépendance, le parti pris de filmer leur entretien dans un décor semblable à des loges, en coulisses, écarte la découverte de leur personnalité intime. Reste en exacerbation ce que nous devinions déjà : l’esprit rock qui les habite.