Lea

Une femme sans influence

Depuis toujours, Marco Tullio Giordana célèbre et creuse l’âme de son pays. L’Italie, à l’histoire et aux mouvements intenses, convulsifs, sanguins. Il a filmé des périodes sombres et pétries de contradictions, pour les portraits de figures Pasolini, mort d’un poète ou Une histoire italienne, et les fresques Maudits, je vous aimerai !, Nos meilleures années ou Piazza Fontana. Et la mafia, forcément, qui coule dans les veines transalpines, malgré elles. Les Cent pas suivait le jeune communiste sicilien, opposant et assassiné Peppino Impastato. Seize ans plus tard, voici Lea, biopic d’une fille du peuple, calabraise, devenue martyre, Lea Garofalo. Vanessa Scalera l’incarne avec une énergie et une intensité intérieure incroyables. Comment une « quidam », depuis toujours liée aux racines criminelles, décide de s’affranchir, après avoir épousé et fait un enfant avec un ex-timide devenu mafieux implacable. Un bras de fer à vie engagé avec la ‘Ndrangheta. Giordana cadre au plus serré une heure trente-cinq de cinéma de la vie d’une femme. Sans fioritures de scénario ni de mise en scène. Sans glorification. Mais avec un soin nerveux à retracer les aspirations contradictoires d’un être décidé à résister à un bulldozer. Sans renouveler le genre, il réussit pourtant un film simple, prenant, fort.