The Royals

Jeux de trône

Ils sont barrés, complètement tordus, mais ils peuvent : ils sont royaux. À l’abri de son palais, la famille de la reine Liz Hurley déroule sa folie et ses petits mensonges dans la nouvelle série addictive et pas si légère qu’il n’y paraît : The Royals.

Une famille royale à la dérive, dans un royaume où leur rôle est plus décoratif que politique. Une reine qui gère son rôle d’une main de fer, dans un gant de velours. Mais aussi des princes qui veulent vivre une « vraie » vie, une princesse qui étouffe dans le carcan des conventions. Un roi qui est un peu fatigué de tout cela et aimerait pouvoir protéger sa famille… Et un frère cadet qui aimerait bien mettre la main sur le trône.

Non, ce n’est pas le résumé simplifié de Game of Thrones ! The Royals est la nouvelle série de Mark Schwann, émérite scénariste de Coach Carter.

Soyons clairs, ce n’est pas LA série de l’année. Il s’agit là d’une libre adaptation d’un roman ado Falling for Hamlet. The Royals est plutôt une réinvention de Gossip Girl, sauce British, avec palais et paparazzi. Dit comme ça, ce n’est pas très attrayant. Et pourtant… On est très vite intrigués par les tribulations de cette famille. D’abord parce que les personnages sont complètement dingues. La reine en tête de file. Interprétée avec malice par Elizabeth Hurley, elle est remarquablement froide et calculatrice, un délice. Les enfants ne sont pas en reste, entre le prince premier de la classe et sa soeur complètement cassée par sa famille, qui noie tout cela dans l’alcool et la drogue. Sans oublier les cousines idiotes et le frère cadet qui ne rêve que de s’asseoir sur le trône, bien sûr : tous les personnages, des plus importants à ceux qui semblent plus anecdotiques, sont savoureux et se dévoilent au fur et à mesure des épisodes.

Car il va leur en arriver, des bricoles. Des histoires de famille, des histoires de trahisons et de successions, un gros grain de folie, sans oublier un peu de sexe…

Le tout va très vite, et la mise en scène résolument rock bouscule tout cela de façon efficace. Split screen, raccords ironiques, ellipses et entrées fracassantes, toutes les options sont utilisées pour mieux secouer cette famille déjà bien amochée par le scénario.

Passant allègrement du baroque au design, la réalisation crée une ambiance qui colle au décor. Une constante : tout est travaillé et ils sont tous beaux. Même quand ce qui est à l’écran est extrêmement glauque, ils sont glamour. Le parfait paradoxe de notre regard sur une royauté obsolète dans un monde moderne, mais qui continue à faire rêver.

Et que la question centrale de ces personnages soit en fait celle de l’abolition ou non d’une monarchie devenue vase clos, aquarium hermétique où les flashs des paparazzis n’éclairent qu’une surface brillante, n’est pas anodine. Elle nous renvoie irrémédiablement à notre propre position de spectateur/voyeur, qui a besoin de leur cirque pour se divertir. Comme dans la vraie vie ?

Que la série, évidemment basée en Angleterre et qui rappelle deux ou trois personnages ayant existé (ressemblance fortuite, bien évidemment), soit à l’origine américaine, en dit long aussi sur le miroir qu’elle tend à une société qui s’est extraite de la réalité. Qu’elle soit « vraie royauté » ou « royauté de papier », émergeant du cinéma ou des médias, par exemple.

Somme toute, sous des dehors plutôt légers et glamour, The Royals a sûrement plus à nous dire que ce qu’on peut y déceler à première vue… La recette d’une série légère (tout de même) mais addictive, dont on attend avec impatience la seconde saison. God save the Queen.