Utopiales

2017, il était temps / 2018, ça prend corps

À la veille des 19e Utopiales, incontournable Festival international de science-fiction de Nantes, retour sur l’édition 2017 et bref aperçu de ce qui nous attend en 2018.

2017, tempus fugit

Je ne sais pas ce qui s’est passé. Un an pour livrer un compte-rendu de festival, c’est vraiment exagéré, même si c’est en quelque sorte raccord avec le thème développé cette année-là : le temps… Il m’a glissé entre les doigts, s’est enfui… Fichtre, je vais tenter de le rattraper, avant qu’il ne soit définitivement trop tard ! Car il y avait de jolies choses à rapporter de l’édition passée.

Deux expériences en salle m’ont tout particulièrement impressionnée. L’une grâce aux spectateurs, l’autre pour le film projeté. Le premier souvenir se déroule du côté de la rétrospective, où je découvrais C’est arrivé demain de René Clair (1944), une sympathique fable sur un journaliste qui se met à recevoir chaque jour les nouvelles du lendemain. Mais ce qui a rendu la séance mémorable, c’est le couple assis non loin de moi ; deux élégants sexagénaires que j’avais repérés avant d’entrer en salle, car l’homme tenait un entonnoir relié à un tuyau, ce qui paraissait plutôt incongru. Mais digne de la ville de Jules Verne (oui, un natif de Nantes, terre de science-fiction) : le dispositif permettait, en effet, au monsieur de livrer discrètement une audio-description à sa compagne aveugle. Simple, efficace, poétique.

Bricolage poétique également du côté de mon coup de cœur absolu, Junk Head de Takahide Hori (2017). Il faut savoir que les Utopiales ont une composante légèrement autarcique : on ne bouge guère de la grande Cité des Congrès de Nantes où, sur trois niveaux, on passe d’une des trois salles de cinéma à l’un ou l’autre lieu de conférence ; où l’on traverse plusieurs expositions pour rejoindre les parties réservées aux livres (= la plus grande librairie éphémère de SF d’Europe + la bibliothèque municipale délocalisée + les stands des éditeurs indépendants et des bouquinistes) et les espaces dédiés aux jeux (vidéo, de plateau, etc.). Et puis, il y a le bar. Et aussi le restaurant. Et dans ce restaurant, il y a de grandes tablées qui incitent au mélange et favorisent les rencontres entre festivaliers et invités. Le soir de Junk Head, j’y dînais donc en stimulante compagnie, enchaînant les petits verres et perdant doucement toute notion de l’heure qu’il était. Mais dans un sursaut de curiosité cinéphile, je me suis forcée à filer jeter ne serait-ce qu’un œil au film de Takahide Hori, espérant à moitié qu’au bout de 10 minutes j’en aurai assez, histoire de retourner bavarder et picoler (deux activités que j’affectionne, je le confesse bien volontiers).

Résultat, je suis restée scotchée à mon siège pendant près de deux heures, à m’émerveiller tout en maudissant mon intempérance pour m’avoir fait rater le début de ce petit bijou entièrement fait main. Mais comme la vie est bien faite, en rentrant j’ai pu trouver le début de Junk Head, version court-métrage, librement mis a disposition par son auteur sur YouTube. C’est ainsi qu’il a trouvé le financement pour la version longue, où son art du running gag prend tout son sens. Je ne vous en dis pas plus, voyez par vous-même.

2018, corps et âme

Et maintenant assez parlé de ce qui fut, intéressons-nous à ce qui adviendra. Et première curiosité, pour lancer l’édition 2018 consacrée au corps, les Utopiales organisent le premier science-festin, ou dîner de l’imaginaire, de leur histoire. Outre bavarder et picoler, j’adore également manger, du coup me voilà en appétit… Mais pas sûr que ce soit compatible avec la seule projection de Perfect (Eddie Alcazar, 2018), l’un des neuf longs-métrages en compétition – j’ai beau fréquenter les festivals de genre, je n’ai vu aucun des titres sélectionnés, c’est très excitant.

En revanche, dans les séances spéciales, j’ai déjà eu l’occasion de m’extasier, à L’Etrange Festival, sur Violence Voyager (2018) du jeune Ujicha, alors je trépigne d’impatience à l’idée de découvrir son The Burning Buddha Man (2012) en sa présence. Et puis, si c’est jouable, je tenterais bien aussi la première Nuit Blanche Cinéma. Et puis les cinq sessions courts-métrages – énorme succès, chaque année, pour ces séances – et puis les documentaires, et puis la rétrospective… Ohlala, il va falloir prendre des forces avant d’attaquer ! Nantes, me voilà (corps et âme) !