L'interview azimutée

Rencontre avec Bouli Lanners, acteur, scénariste, réalisateur

Barbe fournie, sourire communicatif, Bouli Lanners porte sa bonhommie sur le front. Acteur toujours juste, homme attentif aux autres, gentil et sympa, il n’en est pas moins un réalisateur pointu qui n’aime rien tant que les paysages auxquels il donne de faux airs de western. Rencontre souriante, entre étrangeté belge et appétit de vivre.


 

Vous dormez à gauche ou à droite du lit ?

Ça dépend comment on se place. Je suis à droite quand on regarde le plafond, toujours. Parce que ma femme est à gauche, toujours.

Vous dormez bien ?

Parfois oui, parfois non. Je m’endors vachement moins bien qu’avant, je dors moins. C’est l’âge, quand on devient un peu prostatique, qu’on doit se lever dix fois pour aller pisser la nuit, on ne se rendort pas bien.

Votre dernier rêve ?

Cette nuit, j’ai rêvé que j’étais en Ecosse. J’adore l’Ecosse et on en revient. J’ai rêvé que j’y retournais. C’est un rêve très précis : je rêvais qu’on allait chez le type qui tient le camping où nous allons et qu’il habitait en ville. Et c’était très bizarre, parce qu’on dormait dans son salon et que, quand on sortait en face de la maison, il y avait un arbre centenaire qui venait de mourir. C’est vraiment un rêve à interpréter. Mais je ne sais pas du tout ce que ça signifie. J’étais dans une voiture super haute et je me disais « mais on va basculer ! ». Très bizarre.

Interview azimutée de Bouli Lanners : Ecosse © Annick Holtz

C’est quoi cet accent ?

Quel accent ? Je n’en ai pas du tout.

Vous avez peur des vampires ?

Non, parce que j’ai un bon sang et que j’en fais beaucoup. Les vampires ne me font pas peur. Ils peuvent venir se servir, ça ne me dérange pas.

Interview azimutée de Bouli Lanners : Nosferatu © Annick Holtz

Vous avez peur du noir ?

Non, j’ai peur de plein de choses, mais pas du noir.

Qui vous impressionne ?

Dieu.

Qui vous impressionnez ?

Pas Dieu. Ça, c’est sûr.

La caméra, c’est une amie ou une ennemie ?

Une amie, et si ça ne l’est pas, il faut s’en faire une amie. Il faut briser la glace, que ça devienne une vraie copine. C’est comme avec quelqu’un, il faut un peu s’oublier. Et contrairement à l’amitié, il faut surtout ne pas être honnête. Il faut tricher, mentir.

Interview azimutée de Bouli Lanners : Caméra © Annick Holtz

Vous aimez mentir ?

Ben, finalement je pense que oui, à mon grand dam. Il y a deux façons de mentir : mentir et exagérer. Chaque fois que je raconte un truc, ma femme me dit : « tu exagères ». Mais c’est ça raconter, sinon ce n’est que le reflet de la réalité, ça ne sert à rien. Moi, j’aime mentir comme ça, raconter des histoires. J’exagère tout.

Interview azimutée de Bouli Lanners : Pinoccio © Annick Holtz

Qu’est-ce qui caractérise la maison ?

Un sentiment de bien-être et de protection absolus.

Interview azimutée de Bouli Lanners : Maison © Annick Holtz

Vous avez un objet fétiche ?

Non, mais j’ai des TOC. Et je ne vous dirai pas lesquels.

Qu’est-ce qui vous énerve ?

Une certaine forme de violence, la malhonnêteté et le mépris.

Comment vous énervez-vous ?

J’ai des coups de sang. Ce n’est pas bon pour la santé. Je ne m’énerve pas souvent, mais je peux m’énerver très fort.

Votre Eldorado ?

Chez moi, avec ma femme, mon petit chien et des amis. Ou l’Ecosse ! Je pourrais y transposer mon chez-moi. Liège, c’est une ville qui me nourrit. J’y suis arrivé à 18 ans, et j’ai su tout de suite que j’étais de là. Je ne m’y attendais pas.

Péniche ?

Non, j’ai acheté une belle maison ; par contre, je ne vivais pas avec ma femme et maintenant, on a une maison où l’on vit ensemble, on a même acheté un petit chien et c’est super.

Plutôt chien que chat ?

Oui, parce que je fais beaucoup de randonnée et c’est mon copain, il vient avec moi. D’ailleurs, il vient partout avec moi, sur les tournages ; il joue dans 11.6 et il jouera dans mon prochain film.

Interview azimutée de Bouli Lanners : chien chat © Annick Holtz

Rouge, blanc ou bière ?

Whisky. J’ai arrêté de boire de l’alcool pendant 2 ans et demi, mais l’appel du whisky est resté plus fort, donc je ne bois plus que ça, mais des single malts. Pas beaucoup, mais j’adore ça. Dans ma tête, je suis déjà à moitié écossais. J’ai mon kilt et je suis en train de faire faire mon tartan. Je suis le plus Liégeois des Ecossais. Ou le plus Ecossais des Liégeois.

Vous dessinez ?

Toujours un peu, pas assez, dans mes carnets. Je fais mes agendas moi-même ; je fais des croquis de situations qu’on a vécues la semaine, ou des paysages, des encres de Chine.

Vous chantez ?

Oui, et j’ai d’ailleurs un groupe depuis cette semaine. J’ai reçu ma première guitare électrique la semaine passée pour mon anniversaire. Elle est très belle, je n’ai plus qu’à apprendre. Et là, du coup, j’ai un groupe qui s’appelle You Bitch, mais on n’a pas encore répété et je n’ai pas commencé mes cours de guitare. On commence ce week-end. Et je chante, en attendant de savoir faire trois accords de guitare.

Interview azimutée de Bouli Lanners © Annick Holtz

Plutôt danseuse ou pédale douce ?

Plutôt pédale douce, mais de fond. Et hyper rando, à pied. J’aime ce rythme-là. Avant, je faisais du cyclotourisme, c’est ce qui me plaît ; je déteste la compétition, je suis tout sauf un sprinter, dans ma vie aussi. Je suis Taureau, j’ai besoin de réfléchir longtemps avant de lancer la machine, mais une fois qu’elle est lancée, ça roule. D’ailleurs ma bagnole, c’est un vieux diesel de 1970 ; il y a trois minutes de préchauffage, mais une fois que c’est parti, c’est parti !

Interview azimutée de Bouli Lanners : Pedale vélo © Annick Holtz

Votre obsession du moment.

Mourir. J’ai pas envie de mourir. Du coup, comme je suis un peu hypocondriaque, il y a des petits éléments qui m’obsèdent. Je suis sûr que je vais faire un infar’, une rupture d’anévrisme, un cancer du cou.

Vous voleriez bien la vie de qui ?

Jeanne Calment. Mais au début, pas à la fin, hein !