Sunrise

Ennemi insaisissable

Comment évoquer au cinéma les violences faites aux mineurs et notamment l’exploitation sexuelle sans rapidement sombrer dans le racolage ? On se souvient par exemple d’un choix de mise en scène discutable opéré par Anurag Kashyap, dans le par ailleurs intéressant Ugly. Pour son deuxième film, Partho Sen-Gupta choisit les voies de l’onirisme et de la suggestion. Soit Joshi, inspecteur de police à Bombay, qui ne parvient pas à se remettre de la disparition de sa fille, Aruna, enlevée dix ans plus tôt. Une nuit, aiguillé par une ombre, il se rend dans le Paradise, un bar où des enfants dansent devant un public d’adultes. Et c’est l’ombre déformée, motif du cinéma expressionniste ou du film noir, qui devient l’image récurrente du film et l’insaisissable ennemi de Joshi. C’est une des belles idées de mise en scène de ce film construit comme un cauchemar. Car la quête du policier, déconstruite et répétitive, a tout du mauvais rêve, lent et suffoquant, dont il semble impossible de s’échapper. Et si Adil Hussain est parfait en policier perdu dans un labyrinthe abstrait, la réalisation de Partho Sen-Gupta est la vraie révélation de ce film sombre et oppressant, qui nous prouve qu’on peut encore trouver des manières de filmer une longue nuit pluvieuse au cinéma.