My Lady

Les actes ont la parole

Une puissante dramatique à l’anglaise, sur laquelle règne la savoureuse Emma Thompson. Richard Eyre se régale en lui faisant camper une magistrate de haut vol, en pleine difficulté. Prenant et instructif.

Emma Thompson irradie dans la peau de Fiona Maye, cette juge de la Haute Cour britannique confrontée à un double enjeu. Professionnel, car elle doit trancher sur le cas d’un ado entre la vie et la mort, qui, témoin de Jéhovah comme ses parents, refuse la transfusion sanguine qui lui permettrait de combattre un cancer. Personnel, car son mari, amoureux d’elle mais esseulé, quitte le domicile pour aller se défouler avec sa maîtresse. Adepte d’un jeu bannissant les afféteries et la grandiloquence, l’actrice nourrit son incarnation d’une puissante intériorité, mêlant l’autorité et le doute, la réflexion et l’action. La maturité lui apporte une prestance affûtée, qui se coule à la perfection dans le costume de « My Lady », comme tout le monde appelle la magistrate, y compris son « petit protégé », au prénom ancré dans le dilemme originel : Adam.

Le solide metteur en scène de théâtre et de télévision Richard Eyre aime filmer les comédiennes « stradivarius », dans des compositions solides et complexes. Judi Dench, Kate Winslet et Cate Blanchett sont passées devant sa caméra. Avec le roman de son ami Ian McEwan, que ce dernier a lui-même adapté en scénario pour lui, il a trouvé un sujet en or pour sa patte classique et son goût du duo directeur d’acteur/comédienne. Une mécanique parfaitement huilée, qui allie la précision de la dramatique à l’ancienne à la minutie documentaire. Car My Lady, The Children Act en version originale, du nom de l’ouvrage de McEwan et de la loi de 1989 instaurant l’intérêt de l’enfant au-dessus de tout, reconstitue avec précision les protocoles judiciaires en question. Le résultat est efficace et prenant. Pas de révolution cinématographique, mais un portrait dense, auquel la présence de Stanley Tucci, expert en finesse « cool attitude », dans le rôle de l’époux, et de la jeune révélation de Dunkerque Fionn Whitehead, dans la peau du cas de justice, apporte un savant relief.