Les ordonnances joyeuses #1

Magical maestro de Tex Avery

Petits trésors à consommer sans modération en ces temps de confinement, pour vous aider à le vivre haut les cœurs !

Le film : Magical maestro (Tom et le magicien ou Maestro magique: Poochini répète Le Barbier de Séville qu’il doit chanter sur scène. Il reçoit la visite de Misto, un magicien, qui lui demande de l’aide. Poochini le renvoie sans ménagement. Misto décide de saboter le spectacle. Grâce à sa baguette magique il fait subir une série de métamorphoses au ténor. Le maestro s’aperçoit de la supercherie de Misto et lui rend la pareille. 

Magical Maestro de Tex Avery demeure, près de soixante-huit ans après sa réalisation, une pépite explosive tant elle nous fait nous lever illico pour sautiller de joie ! Car on ne peut que rugir de plaisir devant l’insolente et savoureuse perversion de tous les codes de bonne tenue qui sont ici dynamités, à commencer par la musique, bien évidemment, mais surtout le genre ! Tout est possible dans le monde de Tex Avery, même et surtout lorsque la transgression est affaire de désirs charnels. À se demander si on peut vraiment coller nos gamins confinés comme nous devant cette irrévérence musicale…

Lorsque le film sort en 1952, cela fait plus de dix ans que Tex Avery règne en maître à la MGM. Il avait fait ses débuts à la Warner en 1935, où il créera quelques-uns de ses personnages les plus célèbres, dont Porky Pig en 1936 et, un an plus tard, Daffy Duck. Mais c’est véritablement avec le producteur Fred Quimby qu’il déploiera toute l’ampleur de sa folle créativité. Droopy apparaît en 1943, tout comme la bombe flamboyante Red, la vamp la plus émoustillante de l’animation, et surtout LE loup le plus célèbre de toute l’histoire du cinéma : Wolfie ! Il fallait oser créer ce personnage génial de Don Juan blasé, nonchalamment fatigué de ce monde saturé de modernité, et qui, le désir enfin réveillé, devient cet érotomane, transi d’amour avec une niaiserie libidinale. Mais qu’est-ce que ce Magical Maestro ? Un pot-pourri des standards de la musique, du classique au folklorique, de l’avant-garde aux airs populaires, un melting-pot qui fonctionne par surimpressions vocales, où l’irrationnel est la règle. Grâce à l’usage de la baguette magique, le réel est survolté, pris dans l’engrenage du désir maléfique du magicien. Tout change, objets comme personnages, tout se contorsionne et se transforme, tel un mantra surréaliste qui défie les lois du genre et de la physique. La bande sonore est un contrepoint désopilant à ce  théâtre de l’absurde. Pour notre plus grande jubilation !