Jeune et jolie

C’est, en surface, une histoire simple : un portrait, en quatre chapitres saisonniers, d’une jeune fille de 17 ans, Isabelle, étudiante parisienne et bourgeoise, devenue prostituée. Un récit cadencé, scandé de chansons douces et ironiques, où tout, des ellipses aux mouvements des personnages dans l’espace, affiche une quiétude de façade, un confort sans faille. Sur la base de ce tempo régulier, François Ozon privilégie le fait brut à l’analyse psychosociologique du phénomène dont il s’inspire, se joue avec humour de notre désir de cerner les motivations de son héroïne, et pose sur sa narration le vernis d’une mise en scène fluide et soignée. Au cœur de chaque plan ou presque, une comédienne sidérante de beauté : Marine Vacth, croisée furtivement chez Klapisch et Arcady. François Ozon filme son visage, sa silhouette, sa démarche, aux portes de l’hypnose. La demoiselle polarise le regard, intrigue, fascine. A ses côtés, Géraldine Pailhas (impressionnante en mère désarmée) et le toujours formidable Frédéric Pierrot accentuent, par leur présence et leurs voix rassurantes, la part insondable d’Isabelle. Ce personnage, dès lors, confine à l’artefact et détient, camouflées, les clefs d’un double-fond. Elle traîne derrière elle l’ombre du Théorème de Pasolini, avance, imperturbable, et sème le trouble avec une grâce confondante.