Pan

Peter avant Pan

Joe Wright imagine la naissance aventureuse de Peter Pan, dans un prequel épique traversant des mondes mirifiques flamboyants. Le Pays imaginaire jaillit d’une palette éblouissante.

Pan après Pan. Un conte réinvente un conte. Comment ? À la lumière des multiples adaptations cinématographiques qui n’ont cessé de transfigurer l’histoire et le personnage créé en 1902 par J.M Barrie – Peter Pan (1953) de Disney, Hook (1992) de Steven Spielberg, Peter Pan (2003) de P.J. Hogan… –, chaque nouvel avatar se regarde avec curiosité. Quelle singularité trouver ? Joe Wright, sur un scénario de Jason Fuchs, trouve sa démarque dans la forme d’un grand spectacle d’aventure narrant l’histoire des origines du personnage. Il réécrit une biographie, de la naissance de Peter à la révélation de Pan, métamorphose de l’enfant ordinaire en héros extraordinaire.

Pan ne revient pas à l’enchantement, à la rêverie, au merveilleux, ni à la magie simple d’un cinéma se souvenant de ses origines. Il se fabrique par des effets spéciaux sophistiqués : le Pays imaginaire est un pays fantastique, grandiose et coloré. Quand Joe Wright dit avoir voulu faire un Peter Pan de 2015, en effet : il est le produit de la démesure des superproductions hollywoodiennes contemporaines, plein des artifices des blockbusters ambitieux. Sur le plan visuel, le Pan de Wright est intelligemment investi – c’est sa grande qualité. Et il s’en dégage un mouvement trépidant, un tempo aventureux à la Indiana Jones, une formidable énergie rock même, innervée par Nirvana et les Ramones.

Voici l’histoire. Dans un Londres crasseux et miséreux, curieusement situé à l’époque de la Seconde Guerre mondiale, monde cruel à la Dickens sous les bombardements nazis, un jeune orphelin nommé Peter (l’enfant-acteur débutant Levi Miller, adorable) est enlevé pour être exploité dans une mine de purgatoire et dans un autre monde où travaillent les enfants. À la recherche de sa mère depuis longtemps, il réalise ici sa quête des origines qui le conduit, après moult péripéties, jusqu’au Pays imaginaire. Il découvre qui il est,
l’enfant d’un prince de conte de fées et d’une femme très humaine. Il lui est révélé le pouvoir de la flûte qu’il porte à son cou depuis son berceau. Il apprend à voler comme d’autres à marcher. Il connaîtra par Lily la Tigresse, princesse amérindienne interprétée par Rooney Mara, tout en parure indienne multicolore, qu’il est l’élu. Traqué par le redoutable pirate Barbe noire, dont les vieux gréements de flibustier naviguent dans le ciel comme des vaisseaux d’épopée spatiale rétro, le jeune Peter est aidé par Crochet (Garrett Hedlund, très cow-boy explorateur), qui le prend sous son aile.

Le récit est classiquement initiatique, l’apprentissage du destin se double d’une perte de l’innocence, la confrontation violente et immédiate à la réalité adulte et intranquille du monde, ses combats, ses guerres, ses luttes pour survivre. Au centre de ces batailles, des pirates puissants, emmenés par le bavard, vaniteux et méchant Barbe noire. Sorte de créature dandy méphistophélique, n conte réinvente un conte, méconnaissable en quête de jeunesse faustienne, n’a jamais été un aussi éblouissant vilain.