Cartel

Ce fut Billy Bob Thornton, le premier, à s’emparer de la littérature noire et puissante de Cormac McCarthy avec l’adaptation de All the Pretty Horses (2001), l’un des romans de la trilogie de la frontière (avec The Crossing et Cities of the Plain), entre mythologie de western, romance et élégie. Ensuite vinrent les Coen, Joël et Ethan : No Country for Old Men (2007), film raide et crépusculaire, quatre fois oscarisé, déroule sur une frontière le récit macabre d’une infortune, dans les replis de la monstruosité humaine fouillée avec un brio glaçant par le grand romancier américain. Puis John Hillcoat, à son tour, a porté à l’écran un roman, le prix Pulitzer de McCarthy, The Road (2009), sombre errance d’un père et d’un fils dans un décor de fin du monde. Et voilà que Cormac McCarthy a lui-même écrit un scénario original pour le cinéma, avec ses obsessions inchangées au travail : la tragédie de l’homme, le bien et le mal, les limites et les frontières. The Counselor (Cartel en VF) se charge de violence, de noirceur, de désespérance : la descente aux enfers d’un avocat respecté qui fait le libre choix, mauvais, de tremper dans une affaire de drogue, est un récit plein d’effroi. L’impeccable Ridley Scott s’empare de cet implacable cauchemar d’une main de maître : film tendu, réalisation au rasoir et acteurs au bord du gouffre. Il y a quelque chose du cinéma des Coen dans ce Scott nouveau.