Festival de Cannes Jour 7

Perlimpinpin

La vie est plus belle au cinéma, disait jadis un slogan familier. Quoique ? Évidemment c’est plus compliqué que ça. Surtout au Festival de Cannes, où tout se mélange plus qu’ailleurs. Les films, leur fond, leur forme, les stars en présence, l’accumulation, et la poudre de perlimpinpin.

Est-ce qu’une belle montée des marche fait un beau film ? Et réciproquement ? La réponse qui convient à ces questions est « Hélas non, pas toujours ». Le hiatus entre le tapis rouge et l’écran noir, c’est exactement ce qui fonde, enjolive et fait perdurer le Festival de Cannes. Qui joue sur le mélange du plaisir à être là dans le Grand Théâtre Lumière, face à l’écran géant qui vient de dérouler son générique final, à quelques rangs ou en surplomb de l’équipe du film. Émue, forcément émue, l’équipe du film. Et, par ricochet, la salle, même si elle n’était pas complètement partie pour l’être, s’émeut à son tour. C’est ainsi que naissent les standing ovations… Et les légendes. Et comme il se doit, on le sait au moins depuis John Ford et L’homme qui tua Liberty Valance, il vaut mieux « imprimer la légende ».

Sauf que ça ne marche pas comme ça. Les films restent les films. 

Et, oui, c’est vrai, on est content de retrouver Catherine Deneuve, là et bien là, sur les marches et sur l’écran, alors qu’elle fut victime d’un AVC pendant le tournage du film d’Emmanuelle Bercot, De son vivant. Et le bonheur est authentique de retrouver la réalisatrice qui fit une magnifique ouverture de la sélection officielle avec La tête haute ici même en 2015 et rafla comme actrice le prix d’interprétation féminine dans Mon roi de Maïwenn. Mais le film ? C’est une autre affaire. 

Poudre d’étoile et perlimpinpin, abracadabra ! Las, l’alchimie ne prend pas. Et cette histoire d’un presque quadra atteint d’un cancer au pronostic létal, de sa mère éplorée, de son équipe soignante dévouée, de ses élèves (il est prof de théâtre), cette histoire-là, malgré la prestation parfaite de Benoît Magimel,  ne survit pas à son écriture ni sa mise en scène, qui enfilent les clichés, les perles et toute une foultitude de ratages gênants…

Nanni Moretti aussi a une histoire avec Cannes : de nombreux films présentés au Festival, la présidence du Jury et une Palme d’Or avec La Chambre du fils. Et si Tre Piani ne renouvelle pas l’adéquation parfaite entre le fond et la forme de Mia madre, il sourd de ce film choral en mineur aux thèmes dérangeants une petite musique qui nous poursuit longtemps. Culpabilité, justice, mensonge, repli sur soi… ce récit « sur trois niveaux » qui donne son titre au film (oui, parce que contrairement à ce que croyait un ami cher, mais non italophone, « Tre piani » ne signifie pas « Trois pianos » !) nous tend un miroir où l’on ne se voit pas si beaux… Son film est implacable et politique. Et pas forcément « plaisant ». C’est ainsi que Nanni est grand.