Cannes 2019 : Motifs de festival #1

Objets volants plus ou moins identifiés

Alerte spoiler : ce texte dévoile une séquence-clé de The Dead Don’t Die.

Le début du festival a vu circuler à l’écran quelques objets volants plus ou moins identifiés. Dans le film d’ouverture, The Dead Don’t Die de Jim Jarmusch (en salle actuellement), c’est une soucoupe volante qui vient chercher le thanatopracteur-samouraï incarné par Tilda Swinton, seul personnage amené à s’extirper du marasme terrestre par le haut – dans un mouvement vertical aussi prompt et inattendu que comique et métaphysique. L’actrice, complice du cinéaste, dans un parfait mélange de droiture et d’extravagance, se nimbe, dès lors, d’une extraordinaire aura et l’on sourit face à cette envolée fantastique, qui lui va si bien au teint.   

Dans Les Misérables de Ladj Ly, comme dans Bacurau de Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles, tous deux en compétition aussi, deux drones investissent le champ de l’image et représentent une menace pour les victimes comme pour les bourreaux du récit, dont ils accentuent la tension. Ces objets volants, capables de contrôler l’action en cours et de mettre en péril les libertés individuelles, appartiennent à la dramaturgie, mais ils induisent aussi une incitation à s’en distancier. Ce qu’ils promènent avec eux dans les airs renvoie à l’essence même du cinéma et son jeu sur les points de vue. Où se situer, dès lors, face à ces dei ex machina modernes, qui surplombent de leur vol anarchique ce qui se joue ici bas ?