Voyages sur la planète cinéma

Festival de Cannes 2017

En quelques films, le cinéphile cannois se fait globe-trotter et peut voyager d’une séance à l’autre en différents points de la planète. Il peut aussi s’interroger sur la notion de genre, sans cesse triturée par les cinéastes.

Iran (Un homme intègre), Hongrie (La Lune de Jupiter), Suède (The Square), Corée du Sud et Etats-Unis (Okja), France (Un beau Soleil intérieur) : une journée cannoise permet de voyager vite et à peu de frais en des points très éloignés de la planète cinéma. La plus proche géographiquement étant Claire Denis, qui, avec Un beau soleil intérieur, examine le passage à vide amoureux d’une quinquagénaire (incarnée par Juliette Binoche) qui ne cesse de chercher à rebondir. Le film, envisagé un temps comme une mise en image des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes, se heurte au refus des ayants droits. Avec la complicité de Christine Angot, Claire Denis construit alors une succession de rencontres (de matches, presque) entre Juliette et divers partenaires masculins, différemment insatisfaisants. Tantôt cocasse, souvent en marge, parfois bouleversante, cette œuvre hors norme de Claire Denis a ouvert une Quinzaine qui se doit d’être à la hauteur d’une singulière proposition de cinéma. La Compétition, elle, fait déjà preuve d’une belle exhaustivité et surtout, contredit elle-même son sélectionneur. Lors de la conférence de presse annonçant les films concourant pour la Palme d’Or, Thierry Frémaux avait laissé entendre que Good Time, des frères Safdie, était une incursion rare, mais salutaire, du cinéma de genre dans la Compétition. Pourtant, qu’est-ce qu’Okja, sinon une fable écologique qui prend les atours d’un film de SF, que La Lune de Jupiter, une parabole christique tournée comme un film d’auteur et de super-héros, et que The Square, une satire sociale mordante comme une comédie de l’âge d’or du cinéma italien ? Le genre est également à Un Certain regard avec le très beau Un homme intègre : reprenant à son compte le personnage naïf du Topaze de Pagnol confronté à la corruption de la société, Mohammad Rasoulof signe un drame social mâtiné de film noir, porté par une mise en scène épurée, et par l’intensité d’un remarquable couple de comédiens. La première belle surprise de la Sélection officielle 2017.