Edward aux mains d'argent

Dansons sous les flocons, ode à Edward

 

IL PARAÎT QUE TOUTES LES PETITES FILLES RÊVENT DU PRINCE CHARMANT…

Eh bien, disons que le mien n’a pas forcément de cheval blanc et de grande épée (hum, au passage, je comprends que Freud s’éclate avec les contes de fées). Non, le mien est un échevelé en noir qui a de drôles de choses dans la tête et une certaine propension à la poésie frisant la naïveté. Une description qui convient à la fois à un certain cinéaste et à sa créature. Tim Burton, Edward aux mains d’argent. Pour une simple et bonne raison. Ces jours froids, gris, où rien ne va, où on en viendrait presque à détester le monde entier en bloc, ces jours où tout semble perdu… Eh bien, Edward peut me rendre heureuse.

Ce n’est pas un film qui rend heureux en sur-sollicitant les zygomatiques. Ce n’est pas foncièrement un film où la fin est tellement happy qu’elle nous colle un sourire niais sur le visage pour le reste du mois…
Mais Edward aux mains d’argent peut redonner foi en l’humanité. Parce que, franchement, qui n’a pas envie de croire que la poésie est une partie de notre vie, qu’il suffit juste d’ouvrir les yeux ?
Certes, le personnage d’Edward finit par repartir dans son château, seul. Mais il y repart pour sculpter de l’éphémère, de la glace et du vivant, qui vont à leur tour enchanter la vie des autres, de ceux qui savent regarder et danser sous les flocons (coucou Sigmund !).
Vous connaissez une meilleure image que celle-là ? Celle de l’être créatif qui ne « colle » pas dans une société normée, mais révèle aux autres leur capacité à aimer et à rêver. Le créateur solitaire dans son travail, qui l’utilise pour toucher les autres…

Il y a le fond, et puis il y a la forme.
Ce regard si pur de Johnny Depp, la beauté de son « monde créatif », l’élégance surannée de son créateur, la banlieue pastel où Edward est, paradoxalement, une tâche noire.
Il faut que je vous avoue quelque chose : je ne suis pas amoureuse d’Edward. Ni de Tim Burton. Mais le génial cinéaste fait partie des trois raisons pour lesquelles j’ai voulu faire ce métier (avec Sean Connery et Jean Rochefort, allez comprendre). C’est d’ailleurs le seul devant lequel ma voix tremblait au moment de poser mes questions. Peut-être parce qu’ Edward reste, malgré mes années d’études de cinéma, pendant lesquelles je l’ai découpé, analysé et réanalysé, un petit morceau de magie, de poésie et de bonheur.
Il faut que je vous avoue autre chose : la poésie et le bonheur qu’amène Edward… Je n’ai même pas besoin de l’avoir devant les yeux pour les ressentir. J’ai peur que le film ne s’use si je le regarde trop. Que sa poésie ne devienne kitsch, que sa magie ne s’évapore et que je me rende compte que je suis devenue aussi hermétique à ses messages que Jim, le petit ami de Kim qui ne voit d’Edward que le danger, ou encore qu’Esmeralda, qui n’essaye même pas de comprendre sa différence. Mais quand, malgré tout, les jours se font trop gris et la vie un peu trop dure, alors j’appelle à la rescousse mon héros, habillé de noir, les cheveux en bataille et les sentiments si visibles qu’ils lui font presque mal. Et je me fais avoir. Je laisse infuser en moi la poésie et l’envie 
de créer d’Edward et de Tim. Et je me rends compte que je suis Peggy, Kim et Edward à la fois, j’ai envie de sculpter et de danser sous les flocons… Et ça me rend immanquablement heureuse.