Au cœur des hommes

Coffret DVD Mendoza

Deux films majeurs et récents du cinéaste philippin Brillante Mendoza sont réunis dans ce coffret DVD immanquable, Taklub (inédit en DVD) et Ma’Rosa, preuves de la réalité d’un cinéma moderne, profond et terriblement humain.

Les éditions Pyramide proposent une opportunité de découvrir deux films phares de Brillante Mendoza, Taklub et Ma’Rosa, or si ce dernier résulte d’un accomplissement de son style et méthode (par ailleurs distingués au festival de Cannes en 2016 via le prix d’interprétation de la meilleure actrice à Jaclyn Jose, voir notre critique), Taklub pourrait en être le modèle accompli dans sa version blanche : le film est centré lui aussi sur un personnage de « mère courage » (Bebeth), au profil sans ambiguïtés (contrairement à  Ma’Rosa), une survivante du terrible typhon Yolanda qui dévasta en 2013 la ville de Tacloban aux Philippines en faisant de très nombreuses victimes. Ainsi ce récit met en exergue l’entraide, la persévérance et la bravoure de cette dernière et des rescapés face à l’adversité. Mendoza montre particulièrement combien ces hommes et femmes sont capables de se dépasser, tenus par une foi intangible en l’humanité, des miraculés en action malgré leur petitesse face à la nature en furie qui les dépasse. Fidèle à son esthétique, Mendoza recréé, donnant une allure de document, avec dureté et minutie, ses multiples histoires, procédant de fait à une mise en apnée totale du spectateur dès les premiers instants jusqu’au bout de son propos. Dans ce procédé, il est à noter combien Taklub est composé d’une introduction terrible et brutale, impossible à oublier, qui joue un rôle de catalyseur, irradiant proprement l’ensemble du récit. Cette exigence de vérité sans concession, loin de d’être la résultante d’un « feeling de l’instant » qui serait capté facilement par une caméra à l’épaule, est l’enjeu d’une organisation spectaculaire et se reflète dans l’obsession du travail abattu par le cinéaste philippin. Le making of du film témoigne combien notamment il parvient par une main de fer à investir l’ensemble de ses collaborateurs et la population autochtone qui participe au film. Et il faut voir l’image de Mendoza sur le terrain, examinant telle guenille ou pan de mur balafré comme s’il s’agissait de la prunelle de ses yeux, une attitude comparable à une sommation permanente, au bénéfice d’un cinéma rigoureux et profondément habité.