L'image manquante

Titre annonciateur. Deux ans et demi qu’on l’attend en salle. Dévoilé à Un Certain Regard à Cannes en mai 2013, il a représenté le Cambodge à l’Oscar du meilleur film étranger en mars 2014. Ce nouvel opus de Rithy Panh est fort. Très fort. Le cinéaste n’en finit pas de célébrer son pays et de creuser sa mémoire vivace, de la fiction (Les Gens de la rizière, Un soir après la guerre) au documentaire. Une œuvre marquée au fer rouge par l’horreur du régime de Pol Pot. L’Image manquante prolonge S-21, la machine de mort khmère rouge et Duch, le maître des forges de l’enfer. Il prolonge et transcende. Car ce récit à la première personne conte son propre parcours. Son enfance épanouie qui déboucha sur l’horreur entre 1975 et 1979. En quête d’une image disparue, comme ce temps-là date de près de quarante ans, il réinvente grâce au cinéma. Le septième art comme matérialisation de l’invisible, de l’introuvable, et ainsi passeport vers l’inoubliable. Judicieuse et bouleversante idée de raconter cette traversée humaine avec des figurines d’argile, incarnation déplacée et pourtant pertinente. Une voix off et des images d’archives, où le sourire de Pol Pot et de ses sbires font froid dans le dos. Contre la disparition et l’extermination, cette quête filmique se révèle apparition salvatrice.