Apprentice

L’exécution du destin

Après le beau Sandcastle, récit d’un passage à l’âge adulte, Boo Junfeng poursuit avec Apprentice son exploration de la jeunesse et de sa formation, avec un récit d’apprentissage peu commun : où comment le jeune gardien très discipliné d’une prison de haute sécurité est initié à l’exécution capitale par pendaison, par un bourreau expérimenté. Il se révèle un parfait exécutant, mais Boo Junfeng laisse en suspens ses raisons, vengeance, rachat ou expiation filiale… Le jeune cinéaste de Singapour, formé au cinéma de la retenue de Hou Hsiao Hsien, déploie lentement un récit presque statique. Même la mort est donnée dans un climat étrangement calme, sans cri et sans déchirement, sans démonstration triviale de la souffrance, comme un acte organisé, ritualisé et strictement codifié. Le bourreau n’a pas d’affect, ni d’empathie pour les condamnés, il exécute la pendaison dans un souci d’efficacité : donner la meilleure mort possible, autrement dit, la plus rapide. Il n’y a place pour aucun sentiment dans ce film carcéral froid et saisissant, qui ne sort que rarement de son huis clos pour s’enfermer dans la maison du jeune gardien, dont la sœur est la seule de tous les protagonistes  à éprouver des sentiments. Elle seule s’échappera du film pour se libérer d’un carcan qui l’empêche de vivre la vie amoureuse dont elle rêve. Son frère exécutera son destin, irrésolu.